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Les Patriotes de 1837@1838 - Frères chasseurs (organisation)
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Frères chasseurs (organisation)
Article diffusé depuis le 3-mai-02
 




L’Association des Frères Chasseurs est une société secrète créée par les Patriotes exilés aux États-Unis, destinée à renverser le gouvernement colonial anglais et à instaurer une république au Bas-Canada. Les fondateurs de la société, les docteurs Robert Nelson et Cyrille-Hector-Octave Côté, Julien Gagnon, François-Marie-Thomas Chevalier de Lorimier, Antoine Doré et Édouard-Élisée Mailhot, optent pour cette stratégie en particulier afin de palier au manque d’organisation et au coulage d’informations qui ont conduit, en partie du moins, à l’échec de l’incursion du 28 février 1838 (SENIOR, 1997 : 219).

La hiérarchie

Le chef suprême de l’organisation des Frères Chasseurs, le Grand Commandeur, est Robert Nelson, également président de la république du Bas-Canada. Deux Grands Aigles se partagent l’Amérique du Nord : le Grand Aigle du Nord, Édouard-Élisée Mailhot, étudiant en droit de Montréal et Charles G. Bryant, de Bangor dans le Maine, le Grand Aigle du Sud. Ces Grands Aigles sont secondés par les Aigles, équivalents de brigadiers généraux, commandant chacun une division de cent hommes. Ces divisions sont placées sous le commandement de deux Castors, ou capitaines, disposant chacun de cinquante hommes. Chaque Castor commande à cinq Raquettes (caporaux) ayant eux-mêmes sous leurs ordres neuf Chasseurs, ou simples soldats (CARDINAL, 1980 : 35).

Les loges

Au début du mois de septembre de 1838, l’organisation des Frères Chasseurs compte plus de 35 regroupements - ou loges - assez importants; le Dr Côté aurait mentionné celles de Châteauguay, Trois-Rivières, Berthier, Québec, Sainte-Martine, Beauharnois, Longueuil, Boucherville, Varennes, Contrecoeur, Saint-Antoine, Saint-Marc, Chambly, Saint-Charles, Saint-Denis, Saint-Athanase, Sainte-Marie, Saint-Césaire, Brôme, Potton, Sutton, Stanstead, Milton, Barnston, Shipton, Nicolet, Saint-Hyacinthe, Montréal, Pointe-aux-Trembles, Sainte-Scholastique, Saint-Benoît, Vaudreuil, Saint-Jacques-le-Mineur, Hemmingford et Sherrington (FORTIN, 1988 : 57). Les dépositions de Louis Bourdon, cultivateur de Saint-Césaire ayant le grade de Castor (STATE TRIALS, vol.2 : 533-534), et de Hyppolite Lanctôt, notaire de Saint-Rémy (STATE TRIALS, vol.2 : 535), nous informent qu’il existe aussi des loges à Beloeil, Saint-Mathias, L’Acadie et Saint-Rémy.

La loge est l’unité de base de l’organisation des Frères Chasseurs. Elle est composée d’au minimum trois membres assermentés. Les membres ont obligation de ne discuter des matières ayant trait à la société secrète que dans ce seul cénacle (AUBIN, 2000 : 225). Au Bas-Canada même, la loge la plus importante est celle de Montréal, dont le comité de direction est situé dans les bureaux de l’avocat John MacDonell, rue Saint-Vincent (AUBIN, 2000 : 218-219, 223). Mailhot, le Grand Aigle du Nord, préside ce comité, dont les principaux membres sont John MacDonell, François Mercure, François Lemaître et Célestin Beausoleil. On y retrouve aussi Guillaume Lévesque, David Rochon, Georges de Boucherville, Benjamin Ouimet , Stanislas Crochetière, Séraphin L’Huissier, Frederick Glackmeyer, Richard Hubert et Féréol Peltier. Ces deux derniers, tout comme MacDonell, ont cependant refusé de prêter le serment chasseur, comme par ailleurs plusieurs chefs montréalais (SENIOR, 1997 : 220; AUBIN, 2000 : 225-226).

Au sein du comité, « on met sur pied une bureaucratie complexe au sein de laquelle des assistants travaillent sous les ordres de divers chefs de service, et des messagers font la navette entre Montréal et St. Albans, au Vermont, où Nelson a installé son quartier général. » (SENIOR, 1997 : 220) MacDonell entretient ainsi une correspondance suivie avec Nelson, à qui il fait parvenir argent et informations provenant « de ses agents de la campagne. » (AUBIN, 2000 : 219) C’est aussi par le comité de Montréal que passent les recruteurs venus des États-Unis, ainsi que les ordres de Nelson.

C’est donc à St. Albans (Vermont) qu’est installé le quartier général de l’Association des Frères Chasseurs. Le président du Comité de direction est Robert Nelson, alors que le Dr Cyrille-Hector-Octave Côté en est le vice-président et trésorier (FORTIN, 1988 : 52). Les autres membres importants sont Julien Gagnon, William Lyon MacKenzie et un dénommé McLeod (STATE TRIALS, vol. 2 : 533; AUBIN, 2000 : 218, 227). C’est ce comité qui supervise l'action de toutes les loges chasseurs, autant du Bas et Haut-Canada que du nord des États-Unis où l'organisation est plutôt appelée Hunter’s Lodge. La déposition de Jean-Baptiste Brien nous apprend aussi que l’Association des Frères Chasseurs a aussi des ramifications en France, « par l’entremise de quelques voyageurs républicains français. » (AUBIN, 2000 : 226)

Le nombre exact de personnes impliquées dans l’Association reste problématique : Colborne parle de 200 000 membres, ce qui est certes un chiffre exagéré , alors que dans sa déposition, Loop Odell affirme que Côté lui aurait dit que 40 000 personnes avaient prêté le serment chasseur (FORTIN, 1988 : 58; STATE TRIALS, vol. 2 : 54).

Le serment et les signes de reconnaissance

En tant que société secrète, l’Association des Frères Chasseurs accueille ses nouveaux membres par une cérémonie au terme de laquelle les nouveaux venus doivent porter serment de fidélité. On bande d’abord les yeux du néophyte avant de le faire entrer dans une pièce où se trouvent trois initiés, dont au moins un doit obligatoirement avoir le grade de Castor. On fait alors s’agenouiller le candidat, qui doit répéter mot pour mot la formule du serment. Dès qu’il a terminé, on lui demande ce qu’il veut voir et pour répondre « La lumière ». « On lui retire alors son bandeau, et il constate qu’il est encadré par deux Chasseurs dont l’un tient un pistolet et l’autre une dague pointée vers sa tête, et aperçoit derrière eux une torche ardente, le tout symbolisant le sort qui l’attend s’il trahit la société. » (SENIOR, 1997 : 220)

Dans sa déposition, Brien nous révèle la teneur du serment :

Je, A.B., de mon consentement et en présence du Dieu tout-puissant, jure solennellement d’observer les secrets, signes, mystères de la société dite des Chasseurs, de ne jamais écrire, peindre ou faire connaître d’une manière quelconque les révélations qui m’auraient été faites par une société ou une loge de Chasseurs; d’être obéissant aux règles et règlements que la société pourra faire, si cela se peut sans nuire grandement à mes intérêts, ma famille ou ma propre personne; d’aider de mes avis, soins, propriétés, tout frère chasseur dans le besoin, de l’avertir à temps des malheurs qui le menacent; tout cela, je le promets sans restriction et consens de voir mes propriétés détruites et d’avoir moi-même le cou coupé jusqu’à l’os. (AUBIN, 2000 : 225)

Les initiés disposent aussi de divers signes afin de pouvoir se reconnaître entre membres de la société :

1- [de] se croiser les doigts du milieu, celui de la main gauche par-dessus celui de la droite; 2- [de] se mettre le pouce gauche dans la narine gauche et l’index de la gauche sur le côté du nez; 3- [de] mettre le petit doigt de la main gauche dans l’oreille gauche; 4- [de] se toucher mutuellement le bas des manches avant de se donner la main; 5- [de] se saluer en s’abordant comme suit : Il fait beau aujourd’hui (en ajoutant la quantième du mois, ou bien le jour de la semaine) le 25 ou lundi : l’initié dans les mystères devant répondre : oui : le 29 s’il peut faire beau; ou bien, si le salut a été par un jour de la semaine : Oui s’il peut faire beau mardi. (la réponse ou salut devant toujours indiquer le lendemain. (ANQ, +CA2QCA32A74/A1 : 368).

L’insurrection de 1838 est la dernière action des loges de Chasseurs du Bas-Canada. L’Association disparaît pratiquement de la province, alors que ses chefs sont soit arrêtés, soit de nouveau en exil aux États-Unis, et que la répression du soulèvement décourage la population du Bas-Canada à prêter de nouveau l’oreille aux propos séditieux.

Marc Ouimet [1328 mots]

Archives nationales du Canada, MG 24 B39, « Déclaration du Dr Jean-Baptiste Brien », dans Le Canadien, 15 novembre 1839, cité dans AUBIN, Georges, Au pied-du-courant : lettres de prisonniers politique de 1837-1839, Montréal, Comeau & Nadeau, coll. Mémoires des Amériques, 2000, 457 p.; Archives nationales du Québec, +CA2QCA32A74/A1, Formule du serment secret des Frères Chasseurs (1837), p. 368-369.; CARDINAL, Armand, Histoire de Saint-Hilaire : les seigneurs de Rouville, Montréal, Éditions du Jour, 1980, 113 p.; DAVID, Laurent-Olivier, Les Patriotes de 1837-1838, Montréal : Comeau & Nadeau, 2000 (1884), 357 p.; FILTEAU, Gérard, Histoire des Patriotes, Montréal, L’Aurore, 1975 (1938), 493 p.; FORTIN, Réal, La guerre des Patriotes : le long du Richelieu, Saint-Jean-sur-Richelieu, Éditions Mille Roches, 1988, 286 p.; Report of the state trials before a general court martial held at Montreal in 1838-9, Montréal, Armour and Ramsay, vol.1-2, 1983, 12 microfiches.; RUMILLY, Robert, Papineau et son temps tome II (1838-1871), Montréal, Fides, coll. Vies Canadiennes, 1977(1934), 594 p.; SCHULL, Joseph, Rébellion : le soulèvement patriote de 1837 au Bas-Canada, trad. de l’anglais par Dominic Clift et Claude Frappier, Montréal, Éditions Québec Amérique, 1997 (1971), 304 p.; SENIOR, Elinor Kyte, Les habits rouges et les patriotes, Montréal, VLB éditeur, coll. Études québécoises, 1997 (1985), 310 p.

 


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